Œdipe répond trop vite à la sphynge

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Kýlix attique du Peintre d’Œdipe


Tout commença par cette question que la sphynge posa à Œdipe et que la philosophie ne cesse de réactiver. L'énigme était : « Qu'est-ce qui marche sur quatre pieds le matin, deux l'après-midi et trois le soir ? »

Il y a très longtemps, en Grèce, un homme, à cette époque, était particulièrement coriace, un dur à cuire. Il a vécu très longtemps, très vieux. Il a survécu aux pires catastrophes qu’on puisse imaginer, toujours bravache, toujours en révolte, brutal et en colère, un peu voyou. Il ne s’est jamais résigné et a continué à n’en faire qu’à sa tête, jusqu’au jour de sa mort, qu’il a choisi. Il s’est éteint, évaporé, loin de tout le monde. Une vraie teigne.

Cet homme était Œdipe, l’enfant maudit, le roi, le vieillard maudit

Un damné de naissance, qui n’a jamais accepté son sort.

Il faut dire qu’il n’a pas été épargné dans sa vie. Les dieux n’ont pas été très aimables avec lui et avec sa famille. Ils l’ont persécuté, ils ne l’ont jamais lâché. Mais il a tenu le choc. Il a tout fait pour échapper au destin que les dieux avaient fixé pour lui. Quand il a dû céder, il a protesté, maudit, il a blasphémé, agi, sans jamais perdre sa fierté.

Personne n’a subi, ou ne subira le destin d’Œdipe (Dieu merci !). Aucun être humain normal n’a été à ce point martyrisé par les dieux, poussé à commettre des actes abominables, sans qu’il s’en rende compte.

Mais cette histoire est d’autant plus parlante qu’Œdipe, après tout, était dans sa vie consciente un être normal, comme nous, juste un peu plus dur ou plus tête de mule que la moyenne (encore que).

Sa révolte, acharnée et souvent vaine, contre les dieux, contre soi-même, contre ses proches, est d’autant plus touchante qu’elle est menée par un être normal. Comment peut-on vivre ça ?

Question malheur, la vie d’Œdipe, dont nous avons raconté les débuts la semaine dernière, a très mal commencé.

En fait, cette vie n’aurait jamais dû commencer

Œdipe n’aurait pas dû naître. Ses parents, Laïos et Jocaste, roi et reine de Thèbes, avaient appris par un oracle d’Apollon que s’ils faisaient un fils, ce fils allait tuer son père.

On ne sait pas pourquoi le mariage de Laïos et de Jocaste était ainsi maudit. Une tradition dit que Laïos avait abusé d’un jeune garçon, et avait été maudit pour cela. Mais tout le monde ne raconte pas la même histoire.

Laïos n’est pas sage. Il aurait dû faire attention à ne pas avoir d’enfant. Mais, un jour, il boit, et ne peut s’empêcher de faire un fils à sa femme, Jocaste.

Jocaste et Laïos décident de tuer ce fils, de l’abandonner sur une montagne déserte pour que des bêtes le mangent. Ils confient le bébé à un berger, qui attache le petit enfant à un bâton en lui perçant les deux pieds.

Mais le berger se refuse à condamner l’enfant à la mort. Il a pitié, et le donne à un autre berger, qui porte le petit dans une autre ville, Corinthe. Œdipe sera élevé avec amour par le couple royal qui règne sur Corinthe. Ce couple souffrait de ne pas avoir d’enfant.

Avec ces nouveaux parents, qui s’appelaient Polybe et Méropé, Œdipe vit à Corinthe une enfance et une adolescence plus qu’heureuses. Il est adoré de tout le monde, jusqu’au jour où un malotru le traite de bâtard.

Inquiet, pris de doute, le tout jeune Œdipe quitte Corinthe en secret, et va à Delphes demander au dieu de l’oracle, Apollon, s’il est bien le fils des parents avec lesquels il vit. Le dieu ne répond pas à sa question, mais lui annonce brutalement qu’il va tuer son père et coucher avec sa mère...

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